Noël mortel
NOËL MORTEL
Nouvelle de Gérard MOREL parue dans le N° 3886
de l’hebdomadaire NOUS DEUX (21 décembre 2021)
Au volant de sa somptueuse Mercedes, Georges Gaudet se dirigeait vers le village de Trévières tout en se demandant quel caprice avait poussé son épouse, la riche et célèbre avocate Françoise Faugier, à louer un chalet dans ce village perdu au cœur des montagnes suisses pour y fêter Noël.
Toujours accaparée par son métier, Françoise ne consentait à quitter Paris que pour de brèves escapades, et seulement dans des stations mondaines où elle était certaine de retrouver ses plus riches clients, voire se créer de nouvelles relations. L’hiver elle skiait à Gstaad et l’été, elle consentait à passer quelques week ends dans sa villa anglo-normande sur les hauteurs de Deauville. Mais avant-hier, elle avait téléphoné à Georges pour lui annoncer qu’elle avait découvert un magnifique chalet à Trévières :
-Je tiens à ce que tu viennes m’y rejoindre pour que nous y passions ensemble le réveillon de Noël. Seuls, pour une fois. Ce qui nous permettra de discuter…
Françoise n’était absolument pas romantique, aussi Georges n’avait-il pas supposé un instant qu’elle veuille réveillonner seule avec lui pour le plaisir de partager un Noël intime et chaleureux. Non. Il se doutait qu’elle avait une décision à lui annoncer, et craignait seulement qu’elle n’ait choisi de divorcer.
-Mais si c’est le cas, se répétait-il encore une fois, elle aurait tout aussi bien pu m’en parler à Paris ou à Deauville. Donc, ce qu’elle a à me dire risque d’être plus grave.
Et son inquiétude augmentait au fur et à mesure qu’il se rapprochait de Trévières… A vrai dire, il n’avait jamais été vraiment amoureux de Françoise, aussi aurait-il pu facilement accepter le divorce, mais il aurait préféré avoir le temps de s’y préparer pour se trouver une autre compagne, évidemment fortunée.
Il n’eut guère de difficulté pour trouver le chalet que Françoise avait loué : c’était le plus spacieux du village.
-Il y a au moins six chambres, et elle l’a loué juste pour nous deux, sourit-il, encore amusé par la volonté de sa femme de toujours s’offrir ce qu’il y avait de mieux.
Il sonna au portail et fut surpris de voir Françoise descendre lui ouvrir la porte elle-même.
D’ailleurs, elle lui ordonna de se charger lui-même de sa valise.
-Jolyon est tout de même payé pour nous servir, rappela Georges.
-Certes, admit son épouse, mais je lui ai accordé une semaine de congé pour lui permettre d’aller fêter Noël chez sa fille.
Dix minutes plus tard, elle proposait à Georges de s’asseoir dans le salon somptueusement rustique du chalet. Elle souriait, et on aurait pu penser qu’elle adressait à son mari un sourire de bienvenue mais, en réalité, elle jouissait de l’étonnement qu’elle lisait dans son regard.
Georges, qui guettait en vain ses explications, finit par lui demander :
-Qu’est-ce qui t’a poussée à réserver un chalet aussi éloigné de tout ? D’habitude, tu n’apprécies la montagne qu’à condition de te trouver dans les stations de ski les plus mondaines…
-Justement, soupira Françoise. Cette année, j’ai désiré m’isoler pour réfléchir sur ma vie, sur mon travail. Et sur notre mariage.
-Notre mariage, sursauta Georges. Que nous reproches-tu ?
Françoise haussa les épaules :
-Rien. Ou tout, peut-être. Nous nous voyons si peu qu’il a fallu que je t’invite à venir passer la Noël dans un chalet suisse pour pouvoir rester un moment seule avec toi.
Immédiatement, Georges protesta :
-Si on se voit si peu, c’est entièrement de ta faute. Ta profession d’avocat t’obsède, tu pars tôt le matin à ton cabinet et tu ne rentres que très tard le soir. Moi, je suis beaucoup plus disponible…
-Sur ce point, tu as raison, ricana Françoise. Personne ne peut te reprocher de trop travailler !!!
Vexé, Georges hésita à riposter, avant de s’écrier :
-Je ne suis pas avocat, certes, mais je te rappelle que je donne des leçons de tennis, qui me sont payées très cher. Parce que je suis un ancien champion international. Tu le savais quand tu m’as épousé, et c’est même l’une des raisons pour lesquelles tu m’as épousé.
Françoise prit le temps de s’asseoir dans un large fauteuil en cuir, avant de rappeler à son tour :
-Non. Je t’ai épousé parce que tu étais très beau. Et que tu semblais amoureux de moi, au point de te prétendre prêt à divorcer de ta troisième femme pour officialiser notre relation.
-Et puis, ajouta Georges, ma précédente femme était ta cousine Margaux dont tu avais toujours été jalouse parce que sa chaîne de salons de coiffure lui rapportait plus que ton cabinet d’avocat. Tu étais ravie de prendre pour une fois l’avantage sur elle en séduisant son mari ! D’autant que…
Il s’interrompit, car il lui avait semblé entendre des pas feutrés provenant du plafond. Comme si l’on avait marché au premier étage.
-Tu as invité quelqu’un d’autre, murmura-t-il.
Françoise mit trois secondes à retrouver son aisance habituelle :
-Bien sûr que non ! Nous sommes seuls ! Accepterais-je de parler de nos problèmes de couple devant des amis ?
-Et pourtant, insista Georges, tu as entendu comme moi…
-Rien du tout, abrégea-t-elle. Je n’ai rien entendu puisque nous sommes seuls ce soir, toi et moi ! A moins qu’un rat ne se soit réfugié à l’étage pour se réchauffer !
Comme son mari gardait un air dubitatif, elle se redressa pour aller chercher une assiette de toasts au foie gras qu’elle lui tendit, avant de reprendre le fil de leur conversation :
-Contrairement à ce que tu t’imagines, je me fichais éperdument de ma cousine ! Mais j’ai appris par la suite qu’elle se plaignait elle aussi de ta paresse, et de ton incapacité à faire autre chose que jouer au tennis !
-J’ai parfois l’impression que tu me détestes, soupira Georges.
-Mais non, nia Françoise. On ne peut pas détester un homme comme toi, qui n’a ni caractère ni ambition. En revanche, je ne vois pas d’intérêt à rester mariée avec toi.
Comme elle lui tendait l’assiette de toasts au foie gras, il lui demanda si elle avait au moins engagé une cuisinière.
-Même pas, répondit Françoise. Je te répète que je n’ai loué ce chalet que pour deux semaines. Donc j’en profiterai pour apprendre à faire la cuisine, ce sera sûrement distrayant.
-Sans doute, mais ce sera moins drôle de la manger, persifla Georges. Et c’est la première fois que je te verrai vivre sans personne à ton service ! En somme, nous allons passer quinze jours tous les deux dans ce chalet isolé ? C’est pire qu’une lune de miel !!!
Françoise eut un sourire énigmatique :
-En tous cas, moi j’ai l’intention de rester ici deux semaines. Mais je ne suis pas sûre que tu supportes de vivre aussi longtemps près de moi.
Cette fois, il ne put se retenir de lui demander pourquoi elle se montrait si provocatrice envers lui, mais elle continua de ricaner :
-Parce que je suis désormais convaincue que nous ne vieillirons pas ensemble.
Et elle lui expliqua que, un mois plus tôt, à l’enterrement de son oncle Maxime, elle s’était trouvée placée par hasard juste à côté de sa cousine Margaux. Toutes deux avaient oublié leurs anciennes rivalités pour le plaisir de critiquer les autres membres de leur famille, et elles en étaient arrivées à échanger pour la première fois des confidences. Margaux lui avait alors révélé qu’elle était sur le point de quitter Georges lorsqu’il avait demandé le divorce pour épouser Françoise.
-J’ai brusquement compris que tu m’avais menti dès nos premières rencontres. Tu as prétendu être immédiatement tombé amoureux de moi, tu as fait semblant d’être prêt à divorcer d’avec Margaux pour me rejoindre, alors qu’en réalité tu savais qu’elle allait se séparer de toi !
-Mais pas du tout, s’écria Georges. C’est elle qui t’a menti, pour perturber notre union. Elle a toujours été jalouse de nous et cherche encore à se venger !
Très calmement, Françoise lui répondit qu’elle aussi, elle avait envisagé cette possibilité. Mais elle avait alors réfléchi que Georges n’était qu’un ancien champion de tennis, prestigieux certes mais sans fortune, et qu’il dépensait beaucoup d’argent pour maintenir le train de vie qu’on lui offrait à l’époque où il disputait des matches importants.
-Or, se souvint-elle, ce ne sont pas les quelques leçons de tennis que tu donnes qui te permettent d’être toujours habillé avec élégance, ni de changer de Mercedes tous les deux ans. J’en suis donc arrivée à me demander où tu trouvais l’argent que tu dépenses. Je t’ai même soupçonné d’imiter ma signature pour détourner une partie de mes comptes bancaires vers les tiens et j’ai fait effectuer des contrôles par mon comptable. Mais il m’affirme n’avoir détecté aucune anomalie sur l’ensemble de mon patrimoine. Et je le crois, parce qu’il est bien le seul homme en qui j’ai une totale confiance.
-Je te remercie, soupira Georges. Dans ce cas, puisque même ton cher comptable n’a rien repéré, tu devrais admettre que je suis honnête.
Françoise le laissa patienter quelques instants avant de s’écrier :
-Ah non ! Je ne t’ai jamais considéré comme un homme intègre ! Même lorsque j’étais sous ton charme, je sentais déjà que tu étais un séducteur, prêt à raconter n’importe quoi pour parvenir à tes fins ! Et puisque tu ne détournes pas l’argent de mes comptes bancaires, je crois avoir deviné comment tu te débrouilles. A chacun de tes divorces, tu demandes et tu obtiens la condamnation de tes épouses successives à te verser une pension, en expliquant aux juges que tu as des revenus modestes alors que tes femmes sont richissimes ! Et quand tu n’obtiens pas ce que tu demandes, je te soupçonne de faire du chantage, en menaçant tes épouses ou tes maîtresses de publier des photos d’elles plus ou moins scandaleuses ou encore de révéler au fisc qu’elles possèdent des comptes bancaires dissimulés dans des paradis fiscaux !
Georges se força à éclater de rire :
-Tu as trop d’imagination ! Tu me donnes des idées, que je pourrais exploiter lorsque nous divorcerons… Parce que je n’ose plus espérer que tu restes avec un homme que tu méprises autant…
Françoise retrouva ce sourire mystérieux qu’elle avait eu en voyant arriver son mari :
-Divorcer ? Je serais tentée de le faire, mais je me méfie de toi. C’est même pour cette raison que je suis venue réfléchir ici sur notre mariage. Et c’est ici que j’ai trouvé une excellente idée pour ne plus avoir à te supporter ni à te craindre… Vois-tu ce que je veux dire ?
Maintenant, Georges ne souriait plus du tout !
Juste à cet instant, le plafond fit de nouveau entendre de légers craquements.
-Cette fois, tu ne peux plus nier que quelqu’un marche à l’étage, hurla Georges.
-Bien sûr que non, insista Françoise. Et si tu ne me crois pas, tu n’as qu’à monter vérifier.
Il aurait été tenté de le faire, mais craignait de paraître ridicule, si vraiment il n’y avait personne. Aussi décida-t-il de traiter l’incident par le mépris :
-Peu importe, après tout ! S’il y a quelqu’un, il finira bien par se montrer !
Françoise en profita pour lui répéter qu’elle avait trouvé le moyen de s’éloigner de lui sans avoir à lui verser une partie de sa fortune.
-Mais reprends donc des toasts, ils sont délicieux !
Le regard de Georges passait du visage de sa femme à l’assiette de toasts au foie gras et, brusquement il se risqua à lui poser la question qui le perturbait :
-Dois-je comprendre que tu aurais empoisonné certains de ces toasts ? Et ce serait pour cette raison que tu aurais loué ce chalet isolé dans un village perdu ? Pour pouvoir me tuer et te débarrasser de mon cadavre ? Mais il y aura forcément un jour où quelqu’un trouvera mon corps, et alors tu seras la première suspecte ! Tes talents d’avocate ne t’épargneront pas une condamnation !
Plus il se montrait inquiet, plus Françoise riait !
Elle attendit qu’il ait fini de parler pour se moquer de lui :
-Te tuer ? Moi ? Pour qui me prends-tu ? Je suis une avocate réputée, j’ai mieux à faire qu’empoisonner mon mari ! En revanche, dans l’exercice de ma profession, j’ai justement eu à défendre plusieurs tueurs à gages. Et je me suis résolue à faire appel à l’un d’eux ! Par chance, cet homme appartient à une organisation criminelle internationale, dont le responsable m’a même consenti une réduction sur le prix de ses services, parce qu’il prévoit qu’il pourra bien avoir encore besoin de moi pour le défendre en cour d’assises ! Bref, ton futur assassin va me coûter beaucoup moins cher qu’une procédure de divorce, et il m’évitera de te verser la moindre pension alimentaire ! C’est lui qui va t’exécuter, d’un coup de revolver. Il aurait pu le faire discrètement, un soir à Paris, dans une rue déserte. Mais je désirais voir ton expression, à l’instant où je t’apprends que tu es sur le point de mourir ! Et sais-tu qui me servira d’alibi en affirmant que j’ai passé la soirée avec elle ? Ma cousine Margaux ! Ton ex femme ! Qui semble te détester encore plus que moi !
Désormais, Georges était trop stupéfait pour réagir ! Françoise en profita pour frapper dans ses mains. Sur le parquet du premier étage résonnèrent de nouveau des pas, qui cette fois n’étaient plus retenus…
Les pas traversèrent la pièce, puis descendirent l’escalier…
-Je savais bien qu’il y avait quelqu’un là-haut, triompha amèrement Georges.
Déjà, les jambes de l’homme apparaissaient dans la cage de l’escalier.
Il était jeune, vigoureux, plutôt beau garçon.
Et il tenait un revolver dans sa main droite.
-Tu as maintenant la preuve que je ne mentais pas, sourit Françoise. Dans quelques instants, tu seras mort. Tu aurais dû te douter que je ne…
Elle s’interrompit d’elle-même, surprise par l’étrange comportement de son mari.
Depuis son arrivée au chalet, Georges s’était montré de plus en plus surpris et mal à l’aise en entendant les propos de sa femme. Mais, maintenant que le tueur à gages s’était montré, il paraissait paradoxalement rassuré.
A son tour, presque amusé…
Malgré elle, Françoise ne put se retenir de demander :
-Que se passe-t-il ? Tu deviens fou ?
Sans même faire l’effort de lui répondre, Georges s’adressa à celui qui était chargé de le tuer :
-Sans blague, Julien ! C’est donc toi qui as été payé pour m’abattre ! J’espère que tu n’as pas oublié ce que je t’ai enseigné à tes débuts ? Tu te souviens de…
Françoise était muette de stupeur.
D’autant que le dénommé Julien, après avoir brièvement hésité à répondre, s’exclama :
-Bien sûr ! Dès que l’on m’a indiqué que ma prochaine victime s’appelait Georges Gaudet, j’ai compris qu’il s’agissait de vous ! Et j’ai été stupéfait de cette coïncidence, moi qui m’interdis toute émotivité, comme vous me l’aviez conseillé à l’époque…
Françoise écoutait le dialogue de ces deux hommes sans encore oser comprendre. Hébétée, elle voyait la situation lui échapper et ne savait même plus comment intervenir dans la conversation.
Georges, qui l’observait du coin de l’œil, goûtait un plaisir cruel à ne surtout pas lui expliquer l’incroyable hasard qui venait de se produire et dont elle mesurerait les conséquences plus tard. Au contraire, il se rapprocha de Julien, assez pour lui donner familièrement une bourrade, tout en s’écriant :
-Tu ne vas tout de même pas me tuer ! Nous exerçons un métier difficile et sans morale, évidemment, mais entre nous, nous devons rester solidaires !
-Je ne sais pas, soupira Julien sur un ton exagérément courtois. J’hésite depuis qu’on m’a confié cette mission.
-Ah non, hurla Françoise, brusquement terrifiée. J’ai payé pour que vous veniez ici abattre mon mari, vous devez aller jusqu’au bout ! Sinon, je ne…
-Non, l’interrompit Georges. Pour une fois, tu n’as pas de chance ! Car tu as engagé sans le savoir un garçon à qui j’ai appris tous les rudiments de son métier de tueur à gages. Vois-tu, depuis que j’ai passé l’âge de briller sur les courts de tennis, pour garder mon train de vie, je ne compte pas sur l’argent de mes épouses ni de mes compagnes, comme tu l’as stupidement imaginé. Grâce à ma réputation et à mes réflexes d’ancien champion, j’ai pu être admis dans une société de tueurs à gages. Tu admettras que je ne pouvais pas t’en parler… Et par un hasard extraordinaire, Julien appartient à la même organisation que moi.
-Peu m’importe, hurla Françoise, d’une voix qui s’efforçait de ne pas trembler. Il est trop tard ! Julien, j’ai commandé et payé ! Vous devez remplir votre mission et tirer sur mon mari !
Comme elle sentait bien que le dénommé Julien hésitait à lui obéir, elle ajouta pour le décider :
-J’ai déjà versé à votre organisation une somme importante, dont vous récupérerez un pourcentage. Mais puisque nous sommes face à des circonstances exceptionnelles, je puis vous accorder une somme supplémentaire. Dès que vous aurez exécuté Georges, je vous emmènerai dans mon bureau. J’y ai apporté environ 50.000 euros, que je me réservais pour passer confortablement mes vacances et fêter mon veuvage. Mais je puis encore vous donner cet argent ! Tout cet argent ! D’ailleurs, vous le mériterez pour avoir tué votre ancien …professeur sans avoir hésité !
-Ne l’écoute pas, cria Georges. Elle a toujours promis n’importe quoi pour parvenir à ses fins ! Mais elle est avare, elle ne veut ma mort que pour économiser sur notre divorce ! Alors, si tu me tues, elle te rappellera ensuite qu’elle a déjà versé la somme convenue et qu’elle ne te doit plus rien ! Ou alors, si vraiment elle t’emmène dans son bureau, elle sortira un revolver de son tiroir et elle t’abattra à ton tour sans hésitation ! Tandis que moi, tu me connais ! Tu sais que je suis régulier ! C’est même la seule exigence qui subsiste encore dans notre milieu ! Je te jure que, pour te remercier de ta solidarité, je te donnerai tout l’argent que tu parviendras à trouver dans ce chalet !
Le regard de Julien passait du mari à l’épouse, visiblement hésitant.
A moins qu’il n’ait espéré faire monter les enchères…
Mais ni Françoise ni Georges ne disaient plus rien.
Alors, avec cette froideur que Georges lui avait appris à cultiver en toutes circonstances dans l’exercice de son métier, il leva son revolver en direction de Françoise et tira deux coups.
L’avocate s’écroula sans pousser le moindre cri.
Georges dissimula un soupir de soulagement :
-Bravo, mon gars ! Je suis fier de toi ! Tu es digne de l’enseignement que je t’ai donné à l’époque ! Et pour te le prouver, je vais tenir ma promesse, comme toujours : nous allons fouiller ensemble les affaires de ma femme, et je te laisserai emporter tout l’argent que tu trouveras ! Ainsi que ses bijoux ! Note qu’ils valent une fortune ! Mais tu les mérites bien ! Ensuite, tu m’aideras à simuler une tentative d’effraction sur l’une des fenêtres du rez-de-chaussée, pour que l’on croie que Françoise a été abattue en surprenant un cambrioleur et…
Il s’interrompit, blessé par le coup de revolver que Julien, toujours sans un mot, venait de tirer dans sa direction.
Alors, le jeune homme se rapprocha de lui et reprit brièvement la parole, juste pour lui dire :
-Vous m’aviez aussi expliqué que, dans notre métier, il ne fallait avoir confiance en personne ! Et ne jamais laisser derrière nous aucun témoin de nos crimes… Voyez-vous, j’ai bien retenu vos leçons !
Il prit le temps d’achever Georges en lui tirant une balle dans la tête puis, toujours aussi calmement, il se dirigea vers le bureau de Françoise pour s’emparer de toutes les valeurs qui pouvaient s’y trouver.
Il savait déjà qu’un jour ou l’autre, c’est lui qui finirait par être exécuté, parce qu’on l’avait prévenu que les tueurs à gages mouraient rarement de mort naturelle. Aussi tenait-il à profiter des avantages de son métier tant qu’il pourrait l’exercer…
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