Les Amants Eternels
Nouvelle de Gérard MOREL parue dans le N° 3774
de l’hebdomadaire NOUS DEUX (29 octobre 2019)
Le docteur Mayet était surpris par la décontraction qu’affichait Christian Castinel dans son cabinet.
Depuis qu’il exerçait sa profession de cardiologue, il s’était habitué à recevoir des patients anxieux d’entendre ce qu’il risquait de leur annoncer, et qui s’efforçaient de garder une attitude courageuse en face de lui mais qui tremblaient malgré eux.
Or, Christian Castinel avait pris le temps de s’installer confortablement dans l’un des fauteuils du cabinet, avant de l’inviter à lui donner son diagnostic. C’était lui qui paraissait diriger l’entretien, avec une aisance telle que le docteur Mayet commençait à se sentir gêné, dans son propre cabinet !
Il haussa le ton, pour reprendre le contrôle de la situation en expliquant à son patient :
-Cher monsieur, j’ai reçu du laboratoire le résultat de vos analyses. Malheureusement, ce n'est qu'une confirmation de mes craintes.
Ici, le cardiologue s’interrompit un instant, pour laisser à Christian Castinel le temps de se préparer à une mauvaise nouvelle :
-Vous souffrez d’angine de poitrine, c’est ce qui vous donne cette sensation d’étouffement lorsque vous faites des efforts. Je vais dès à présent vous prescrire de la trinitrine, à aspirer durant vos crises. Mais surtout, je vais vous envoyer faire différents tests, pour vérifier si l’on peut pratiquer sur vous une angioplastie. Il s’agit là d’une intervention sans danger, qui vous permettra de retrouver votre ancienne vigueur. Il faudra aussi…
-Non !
Le docteur crut avoir mal entendu, ou s’être mal fait comprendre, et il allait reformuler sa proposition, mais Christian Castinel décida de lui faire gagner du temps en lui expliquant son refus de toute intervention :
-Je ne veux pas risquer de souffrir. Même s’il s’agit d’une intervention bénigne. Parce que je ne suis plus assez attaché à la vie pour désirer la prolonger.
Le docteur Mayet considéra qu’il devait insister. Aussi expliqua-t-il à son patient qu’une angioplastie était sans danger et lui éviterait les crises dues à l’angine de poitrine, mais Christian resta catégorique :
-Docteur, je vous remercie de l’intérêt que vous me portez. Mais la vie ne m’intéresse plus. Comprenez-moi, je suis divorcé depuis sept ans, et je ne vois même plus ma fille, que mon ex-femme a détournée de moi.
Ses confidences émurent le médecin, qui tenta encore une fois de le faire changer d’avis :
-Certes, je comprends que cette séparation a été douloureuse. Mais vous êtes âgé de seulement 46 ans. Vous pouvez donc espérer recréer une famille, ou tout au moins un couple.
-Non !
Comme tout à l’heure, le refus de Christian était ferme. Et, pour éviter au médecin d’insister, il lui raconta que, huit ans plus tôt, il était encore marié, et heureux. Il exerçait la profession d’architecte à Deauville et, afin d’améliorer ses revenus, il partait travailler deux jours par semaine à Paris, pour le compte d’un confrère prestigieux. C’était justement à Paris qu’il avait fait la connaissance de Morgane….
Huit ans après cette rencontre, il ne comprenait toujours pas comment il avait pu balayer tous ses principes de loyauté et de fidélité, négliger aussi l’amour sincère qu’il portait à son épouse, pour s’éprendre soudainement de Morgane, dont le charme nonchalant avait bouleversé sa vie…
Le jour-même où il était allé visiter son appartement pour établir un diagnostic de rénovation, il s’était senti irrésistiblement attiré par cette femme. Au point d’oublier qu’elle était une cliente et de lui faire des avances !
En guise de réponse, Morgane l’avait embrassé…
Au petit matin, elle lui avait murmuré qu’elle l’avait désiré dès qu’elle l’avait vu. Et comme il lui avait dit qu’il devait rentrer en Normandie, elle lui avait promis de le rejoindre chez lui chaque fois qu’il séjournerait à Paris.
C’est trois semaines plus tard qu’elle lui avait avoué être mariée, avec un homme violent, qu’elle n’osait pas quitter.
Ils n’avaient guère résisté au désir de se retrouver un soir par semaine. Au début, Morgane redoutait que son mari n’ait des soupçons, même si elle lui racontait qu’elle allait dormir chez sa soeur, en pleine dépression nerveuse.
Christian craignait, lui aussi, que son épouse ne s’aperçoive qu’il n’était plus aussi attentionné qu’avant.
Alors, comme il gardait un sincère attachement pour sa femme, et qu’il ne voulait surtout pas l’inquiéter, il s’efforçait de lui faire plaisir et de se donner bonne conscience en lui rapportant chaque semaine un cadeau de Paris : un sachet de macarons, ou un bibelot.
Mais à vrai dire, au bout d’un mois, ni Christian ni Morgane ne se souciaient plus de leurs conjoints. Ils se sentaient possédés par cet amour qui s’imposait à eux, malgré eux.
Au point que Morgane, la première, avait pris la décision de divorcer.
-Déjà, s’était étonné Christian. Tu me connais à peine. Imagine qu'un jour nous cessions de nous désirer et que...
-C’est impossible, avait protesté la jeune femme, en l’embrassant. Je n’ai jamais aimé un homme comme je t’aime. Depuis que je t’ai rencontré, je voudrais n’être qu’avec toi. Et quand je me retrouve en face de mon mari, j’ai honte de lui mentir… Aussi, je dois divorcer. Parce que, même si tu devais me quitter un jour, je n’aurais plus la force de continuer à vivre avec lui ! Depuis que je te connais, je ne supporte plus ses colères, ni surtout sa violence ! Mais rassure-toi, je ne te force pas à quitter ta femme ! Je t’aime trop pour te contraindre à quoi que ce soit !
Il n’avait rien trouvé à lui répondre. Parce qu’il ne se sentait pas capable d’abandonner son épouse, à qui il n’avait jamais eu le moindre reproche à adresser. Mais il ne pouvait pas non plus renoncer à Morgane.
En réalité, sans se l’avouer, il avait déjà le pressentiment que ni lui ni Morgane ne sortiraient indemnes de cette passion…
Bref, Morgane l’avait quitté ce matin-là en lui jurant de tout révéler à son mari dès le prochain week end.
Lui, il était rentré le vendredi soir à Deauville. Il avait embrassé sa fille et il s’était mis à table. Mais il se souvenait encore aujourd’hui qu’au cours de ce repas, pour la première fois, son épouse lui avait fait remarquer qu’il n’écoutait pas ce qu’elle lui disait…
C’était exact : il ne pensait qu’à Morgane.
Sans pouvoir se douter qu’il ne la reverrait plus…
Elle n’était pas venue le rejoindre dans son studio parisien le jeudi suivant, et il en avait déduit qu’en face de son mari, elle n’avait pas trouvé le courage de lui annoncer qu’elle désirait le quitter. A moins qu’elle n’ait commencé à lui parler mais qu’il ne l’ait convaincue de renoncer à divorcer.
Quelques jours plus tard, ne supportant plus de n’avoir aucunes nouvelles d’elle, il avait essayé de lui téléphoner.
Il avait alors découvert que son numéro de portable n’était plus attribué.
Inquiet, il avait envoyé Julie, sa secrétaire, tenter de se renseigner, dans l’immeuble où habitait Morgane.
Julie était revenue le lendemain matin, en manifestant tous les signes d’une grande émotion. Et, tout en frémissant encore, elle lui avait raconté avoir appris que Morgane aurait été tuée par son mari, à coups de couteau.
Christian se souvenait que Morgane s’était souvent plainte du tempérament violent de son mari, et il en avait conclu que le mari l’avait poignardée parce qu’elle lui avait annoncé sa volonté de divorcer.
Il avait réussi à dissimuler son drame à sa femme, pour ne pas la perturber inutilement, mais il avait sombré dans une violente dépression nerveuse. Parce que Morgane lui manquait, bien sûr, mais plus encore parce qu’il se sentait responsable de sa mort. Il se répétait que rien ne serait arrivé si elle ne l’avait pas aimé au point de vouloir divorcer pour lui…
A cette époque, il avait dû faire des efforts désespérés pour garder une apparence sereine, et conserver son chagrin pour lui seul.
Du moins, il avait cru y parvenir. Jusqu'au soir où sa femme envoya leur fille se coucher plus tôt que d'habitude, exprès pour rester seule en face de lui et lui annoncer qu'elle ne supportait plus de le voir toujours triste en face d'elle.
-Mais non, tu te fais des idées, avait-il protesté doucement, sans espérer la convaincre.
Peut-être même était-il secrètement soulagé de constater que l'on avait enfin perçu sa détresse.
Il espérait que sa femme lui pose des questions, ce qui lui aurait enfin donné l'occasion de se confier, mais elle lui fit seulement part de sa décision :
-Je ne peux plus continuer à vivre avec toi dans ces conditions ! J'en ai parlé avec mes parents, qui m'ont proposé de retourner vivre chez eux, le temps que je me réorganise. Je partirai la semaine prochaine. Et je demanderai ensuite le divorce !
Conscient de ses torts, il ne pouvait que la comprendre.
Avec une totale indifférence, il avait assisté à la procédure judiciaire, sans tenter de s'opposer aux demandes financières de sa femme. Il lui avait abandonné leur maison de Deauville, ainsi que leur résidence secondaire dans les Alpes, et il s'était engagé à lui verser une pension alimentaire du montant exact qu’elle souhaitait...
C'est seulement en fin de procédure, au soir où le jugement de divorce avait été rendu, qu'il avait mesuré le malentendu qui s'était instauré entre lui et son épouse : lui, il avait tout accepté parce qu'il se sentait coupable de ne plus l'aimer, et elle, elle avait cru qu'il était prêt à tout perdre pour se débarrasser d'elle.
Par la suite, elle avait continué à se venger de son indifférence, en détournant leur fille de lui. Au point que l’adolescente avait refusé d’aller passer ses vacances avec son père et, très vite, elle n’avait même plus accepté de le retrouver un week end sur deux, sous prétexte que ses études ne lui en laissaient pas le temps.
Christian avait été hébergé chez Julie, sa secrétaire, qui était célibataire et qui lui avait discrètement fait comprendre qu’ils pourraient se consoler mutuellement de leurs solitudes.
Mais il restait trop affecté par la mort de Morgane pour répondre à ses avances, et il avait préféré faire semblant de ne pas les remarquer. Moins d’un mois plus tard, il s’installait à Honfleur dans une petite maison, la première que lui avait fait visiter un agent immobilier.
Il y vivait encore seul…
Aujourd’hui, en sortant de chez le docteur Mayet, il repensait à cet enchaînement de déceptions, lorsqu’il crut avoir une hallucination en apercevant Morgane !
Elle-même !
C’était impossible, évidemment, puisque Julie lui avait raconté qu’elle avait été tuée par son mari.
Pourtant, la jeune femme avançait dans sa direction et, en se rapprochant, elle le reconnut elle aussi…
Elle lui sourit joyeusement, comme s'ils s'étaient quittés la veille :
-Bonjour, s’écria-t-elle en se rapprochant pour l’embrasser.
Il eut besoin de quelques instants pour dominer sa stupéfaction et parvenir à lui répondre.
-Bonjour, bredouilla-t-il. Je… Je ne m’attendais pas à te retrouver ! Surtout pas à Honfleur ! A vrai dire, je ne savais plus où tu étais… J’ai cru que…
Elle eut un geste d’indifférence :
-Peu importe. Nous nous sommes perdus de vue, et tu n'imagines pas à quel point je l’ai regretté, mais je ne garde que de beaux souvenirs de notre histoire !
Après un instant d'hésitation, elle ajouta :
-Sincèrement, avec le recul des années, je puis t’affirmer que tu restes le seul homme qui m’a rendue heureuse. Tandis que mon mari…
Christian avait besoin de se justifier. Aussi profita-t-il de cette allusion à son mari pour l’interrompre :
-Justement, on m’avait raconté que ton mari t’avait tuée. J’aurais dû vérifier, mais j’étais si bouleversé…
-Ce n’est pas tout à fait faux, soupira Morgane. Il avait toujours été violent et, quand je lui ai annoncé ma volonté de divorcer, il n'a pas supporté que je lui échappe…
Elle eut un sourire amer pour finir sa phrase :
-Mais tu as aujourd’hui la preuve qu’il n’a pas réussi à nous séparer !
-Où étais-tu, interrogea Christian. Pourquoi ne m’as-tu jamais recontacté ?
Manifestement, Morgane était embarrassée pour lui répondre. Elle parut hésiter un instant, avant de raconter qu’il lui avait fallu beaucoup de temps pour surmonter les brutalités infligées par son mari :
-Je n’osais pas déposer plainte contre lui, parce qu’il me faisait peur, mais c’est sûrement ce qui l’a encouragé à se montrer de plus en plus brutal. C’est aussi pour cette raison que je me suis si vite attachée à toi. Parce que tu étais doux, et que tu m’écoutais. Tu m’aimais vraiment. Comme personne ne m’avait encore aimée.
-Moi non plus, je n’avais aimé aucune femme comme je t’ai aimée. Pas même la mère de ma fille.
Morgane l'interrogea aussitôt :
-A ce propos, comment va ta fille ? Tu m’en parlais si souvent, je me souviens qu’elle s’appelait Anaïs. Que devient-elle ?
Christian fut bien obligé de reconnaître :
-Je n’en sais rien. Après ton départ, j’étais si mal que ma femme a fini par demander le divorce. Et Anaïs n'a plus voulu me revoir.
Morgane parut stupéfaite :
-Pourtant, tu l’aimais. Je le sentais, rien qu’à la façon dont tu parlais d’elle.
-Bien sûr, reconnut Christian, en sentant des larmes monter à ses yeux, comme toujours lorsqu’il pensait à sa fille. Elle me manque toujours, mais…
-Tu dois la revoir, l’interrompit Morgane. Au moment de ton divorce, elle a peut-être été manipulée par ta femme, mais aujourd’hui, elle est presque majeure. Tu peux lui expliquer ce que tu as vécu, et elle doit être capable de t’entendre ! Voire, de te comprendre.
Il fut amusé de constater que Morgane n’avait vraiment pas changé. Durant leur liaison, elle l’encourageait déjà à prendre des initiatives qui paraissaient vouées à l’échec, en lui répétant qu’on n’avait jamais rien à perdre et qu’il fallait tout tenter.
Alors, parce qu’il était toujours bouleversé d’évoquer sa fille, il tenta de faire dévier la conversation en demandant à Morgane comment elle vivait aujourd’hui.
Mais celle-ci restait floue :
-L’agression de mon mari a eu de très graves conséquences. Il a fallu que je change complètement d'existence. J’ai disparu de Paris : peut-être pour ne pas avoir à supporter la pitié de tous mes proches qui avaient appris avec stupeur combien il pouvait se montrer brutal. Mais toi, je ne t’ai jamais oublié… Et en te reconnaissant tout à l’heure, j’ai eu la confirmation que je n’avais jamais cessé de t’aimer !
-Vraiment ? Alors…
Christian n’hésita qu’un instant avant de proposer :
-On pourrait se revoir. Se fréquenter de nouveau, comme il y a sept ans… Si tu es seule, bien sûr !
Il frémissait comme un adolescent en guettant la réponse de Morgane.
Qui ne correspondit ni à ce qu’il espérait, ni à ce qu’il redoutait.
-Oui, sourit-elle. Bien sûr, nous nous reverrons ! …Mais pas tout de suite ! Oh, je vis seule, rassure-toi. Après l’agression de mon mari et avec les séquelles que j’en ai gardées, il n’y avait aucun risque que je refasse ma vie, selon l’expression populaire. Mais enfin…
-Est-ce que tu travailles, se risqua à demander Christian.
Morgane eut de nouveau un geste flou de la main :
-Oui. A ma façon. Pour ne pas m’ennuyer. Mais je n’ai plus la vigueur nécessaire pour occuper un emploi salarié, comme quand je t’ai connu. Désormais, j’accomplis ponctuellement des …missions !
Il n’osa pas poser sa question de façon plus insistante, parce qu’il était trop heureux de la retrouver pour courir le risque de la fâcher et de la perdre, mais le mystère dont s’entourait Morgane le perturbait !
Il tenta tout de même une dernière question :
-Puisque tu es seule, toi aussi, pourquoi ne pas reprendre notre histoire... comme avant ?!
Elle eut un sourire triste pour le décourager avec délicatesse :
-Actuellement, cela ne m’est pas possible ! Mais je suis heureuse que tu me le proposes, parce que cela me prouve que tu m’aimes autant que je t’ai aimé ! Christian, tu resteras le plus grand amour de ma vie ! Sinon le seul ! Il ne faut pas que tu en doutes, sinon… Sinon, notre amour deviendrait inutile !
Cette fois, il haussa le ton :
-Si c'est vrai, puisque nous nous aimons, tu ne dois pas repartir en m'abandonnant ! Ce serait trop douloureux pour nous deux, et inutile.
Alors, elle consentit enfin à prendre sa main, pour lui confier, très doucement, avec cette intonation apaisante qu’elle adoptait déjà au temps de leur liaison lorsqu’il se mettait inutilement en colère :
-Ecoute-moi, et essaie de me faire confiance. Je te promets que nous nous retrouverons, et qu’à compter de ce soir-là, nous ne nous quitterons plus jamais ! Parce que notre amour est assez sincère pour représenter une force. C’est uniquement grâce aux sentiments que j’avais pour toi que j’ai pu survivre aux blessures de mon mari. Et toi aussi, tu dois te sentir protégé par notre amour, si tu as des épreuves à traverser.
Ce fut alors au tour de Christian d’avoir un rire amer :
-Des épreuves ? J’en ai déjà beaucoup subies, à la suite de ta disparition. J'ai tout perdu : ma femme, ma fille, ma maison. Mais justement, désormais je n’ai plus peur de rien. Au point de rester indifférent, alors qu'un cardiologue vient de m'apprendre que j'étais médicalement condamné, si je n'acceptais pas une intervention.
-Tu as tort, protesta Morgane, soudainement sérieuse. Ta vie n’est pas finie. Dans ton intérêt et celui de tes proches. Il faut que tu écrives à ta fille. Anaïs est assez grande pour ne pas rester soumise à l’influence de ta femme, et elle te répondra peut-être. Et même si elle ne te répond pas, du moins saura-t-elle que son père pense à elle avec affection, ce qui adoucira son avenir ! Et puis…
Elle s’interrompit en constatant que Christian essuyait honteusement deux lourdes larmes qui s’écoulaient de ses yeux.
-Promets-moi de te soigner ! Et de recontacter ta fille ! Je ne puis t'en dire davantage, mais je sais qu'elle a besoin de toi.
-Tu as sûrement raison, admit-il, sans se demander comment Morgane pouvait être aussi catégorique. Je te promets de me lui écrire dès ce soir. Et de me faire opérer. Tu vois bien que j'ai besoin de toi, pour prendre mes décisions...
-Mais non, sourit-elle, rassurée. Tu as toujours été efficace, et tu n'as besoin de moi que pour l'amour ! Rassure-toi, c'est déjà beaucoup.
Elle dut craindre qu’il ne lui pose de nouvelles questions, auxquelles elle ne pourrait pas répondre, car elle regarda sa montre et s'écria qu'il était plus tard qu'elle ne pensait :
-Je suis en retard, s'écria-t-elle. Comme toujours ! Il faut que je parte...
-Donne-moi au moins un numéro de téléphone où je pourrai t'appeler pour qu'on convienne d'un rendez-vous..., supplia-t-il.
Mais elle, toujours étrangement insensible à ses attentes, refusa :
-Il n'est plus temps. Mais je te recontacterai. Dès que possible !
-Tu ne connais pas mon numéro actuel, lui fit-il observer.
Alors, juste pour le rassurer, elle nota le numéro qu'il lui dicta.
Et elle le regarda s'éloigner, tout en déchirant distraitement la feuille sur laquelle elle venait de noter son numéro...
Seule désormais, elle regrettait de n'avoir pas pu lui avouer qu'elle n'avait été autorisée à revenir dans ce monde qu'à titre exceptionnel, à l'occasion de la fête d’Halloween : pour le décider à se faire soigner et poursuivre sa vie aussi longtemps qu'il aurait un rôle à tenir envers sa fille.
Histoire de se consoler, elle se dit qu'il mourrait après s’être réconcilié avec sa fille, lorsque celle-ci n'aurait plus besoin de lui.
Ainsi aurait-il accompli tout ce qu’il lui incombait de faire sur la terre.
Après quoi, Morgane savait déjà qu’elle le retrouverait, pour partager amoureusement l'éternité...
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